ANTIGENES PROTEIQUES INDUCTEURS D'ANTICORPS NEUTRALISANT LE
VIRUS VIH
La présente invention se rapporte à un antigène protéique comprenant une protéine porteuse, un bras espaceur, et une séquence peptidique spécifique induisant des anticorps neutralisants des isolats primaires du virus VIH et à son utilisation dans un vaccin anti VIH.
La mise au point d'une méthode d'immunisation contre le VIH est aujourd'hui l'une des priorités de la recherche scientifique.
Les obstacles majeurs que sont la grande variabilité génétique du virus et la faible exposition au système immunitaire d'épitopes viraux neutralisants freinent considérablement l'élaboration d'une immunité neutralisante.
La glycoprotéine d'enveloppe du VIH qui est requise pour conférer au virus son caractère infectieux représente la cible d'anticorps neutralisants. Ces caractéristiques ont fait de cette dernière un sujet d'investigations intenses.
Plusieurs auteurs ont proposé d'utiliser comme antigène vaccinal des peptides représentant des épitopes conformationnels de l'enveloppe du virus VIH. On peut se référer notamment aux travaux de Scala G (J. Immunol., (1999), 162: 6155-6161), de Keller P.M. (Virology (1993), 193, 709-716) ou de Lundin K (Immunology, (1996), 89: 579-586). De tels antigènes ont été également décrits dans la demande de brevet WO 99/66046. Ces peptides, obtenus en général par sélection contre un anticorps monoclonal dirigé contre l'enveloppe du virus VIH, ont la particularité d'être spécifiques de cet anticorps et de ne pas être reconnus par d'autres anticorps monoclonaux. Les tests d'immunogenicite réalisés chez l'animal, montrent que seuls certains de ces peptides sont capables d'induire des anticorps neutralisants le pouvoir infectieux du virus VIH. De plus, les réponses en anticorps neutralisants telles que décrites dans l'art antérieur sont dirigées contre des souches de VIH bien établies mais sont insuffisantes pour neutraliser des isolats primaires du VIH. Du fait de la très grande variabilité du virus VIH, de telles réponses présentent peu d'intérêt d'un point de vue vaccinal. Il existe donc un besoin pour un vaccin capable d'induire une immunité protectrice contre des isolats primaires du virus VIH.
La présente invention a pour objet de pallier ce besoin et concerne un nouvel antigène protéique comprenant une protéine porteuse, un bras espaceur et une séquence peptidique spécifique, ledit antigène étant capable d'induire des anticorps neutralisants des isolats primaires du virus VIH.
La présente invention concerne donc : Un antigène protéique de formule P-E-S dans laquelle : P désigne une protéine ou un peptide porteur ou un fragment en dérivant; E désigne un bras espaceur de 2 à 25 acides aminés constitué principalement de glycine, proline ou alanine;
S désigne une séquence peptidique choisie dans le groupe consistant en les séquences ID NO1 à ID NO8.
Les traits représentent une liaison peptidique.
Selon un aspect, le bras espaceur E est constitué de 3 résidus glycine.
Selon un autre aspect, la protéine ou le peptide P est soit une protéine disposant d'une séquence signal provenant d'une bactérie ou d'un phage, soit une protéine ou un peptide renforçant l'immunogénicité de la séquence S.
Dans un autre mode de réalisation, l'invention concerne un vecteur d'expression codant pour ledit antigène protéique.
Selon un aspect particulier, le vecteur d'expression est un phage filamenteux et la protéine P est la protéine plll et/ou pVIII.
Dans un autre mode de réalisation, l'invention concerne un vaccin comprenant un antigène ou un vecteur tels que définis ci dessus en combinaison avec un support pharmaceutiquement acceptable et éventuellement un adjuvant.
Selon un aspect particulier, le vaccin est utilisé pour le traitement ou la prévention de l'infection à virus VIH.
Enfin l'invention concerne une méthode de diagnostic comprenant la mise en contact d'un antigène ou d'un vecteur d'expression tels que définis ci-dessus avec un échantillon biologique.
Description détaillée de l'invention
On entend par "antigène protéique" dans le cadre de la présente invention, un antigène de formule P-E-S qui induit des anticorps neutralisants des isolats primaires du VIH. Par "isolats primaires" on entend des souches de virus VIH provenant de sujets séropositifs asymptomatiques et pour lesquelles les cultures ont été effectuées uniquement sur cellules primaires, en l'occurrence les cellules mononucléées du sang périphérique humain. L'induction d'anticorps neutralisant les isolats primaires du VIH est mis en évidence par le dosage de la protéine p24 dans le surnageant de culture de la souche virale testée comme cela est décrit dans l'article de C. Moog et al (AIDS Research and human retroviruses, vol 13(1), 13-27, 1997). On estime dans le cadre de la présente invention que des anticorps neutralisants ont été induits par l'antigène protéique, lorsque le sérum dilué au 1/5 entraîne une réduction d'un facteur 10 de la quantité de p24 présente dans le surnageant de culture d'un isolât primaire.
Une séquence S selon l'invention est sélectionnée dans le groupe consistant en
SEQ ID NO: 1 Ile Pro Thr Leu Pro Ser Ser
SEQ ID NO: 2 Trp Ala Leu Asp Arg Gly Ala
SEQ ID NO: 3 His Ala Thr Gly Thr His Gly Leu Ser Leu Ser His
SEQ ID NO: 4 Thr Arg Leu Glu Cys Phe Ser Ala Gly Trp Arg Leu Ser Ala
Cys
SEQ ID NO: 5 Trp Tyr Ser Lys Asp Thr Ser Trp Phe Thr Leu Phe Leu Pro
Val
SEQ ID NO: 6 Thr Gly Gly Pro Leu Tyr Pro Phe Tyr Ala Leu Val Pro Ser
Tyr
SEQ ID NO: 7 Asn Leu His Ser Lys Val Phe His Gly Leu Val Ile Arg Gly
Gly et,
SEQ ID NO: 8 Gin Ser Leu Cys Ser Pro Met Pro Leu Gly Ser Cys Ala Leu Ser
Les séquences S selon l'invention peuvent être sélectionnées au moyen d'une banque de phages exprimant à leur surface une structure protéique de formule P-E-S dans laquelle P désigne la protéine PMI et/ou PVIII d'un phage filamenteux, E un bras espaceur et S un peptide aléatoire. De telles banques sont décrites dans les articles de Keller et al (Virology, 193, 709-716 (1993)), de Felici F. et al (J. Mol. Biol., 222, 301-310 (1991), de Scott et al (Science, 249, 386-390 (1990)) et de Schatz P. J. (Current Op. Biotech, 5: 487-494 (1994)). Les séquences S selon l'invention peuvent être sélectionnées selon la même méthodologie développée dans l'article de Barban V. et al. (Journal of General Virology, vol 81, 461-469 (2000)) en utilisant, comme anticorps pour la sélection des phages recombinants relevants, des anticorps monospécifiques de l'enveloppe du VIH qui ont été isolés par purification de sérums de souris SCID (Immunodéficience combinée sévère) qui ont été "humanisées" par injection intrapéritonéale de lymphocytes de sang périphérique humain provenant de sujets séropositifs asymptomatiques (Mosier et al., Science, 251 : 791-794, 1991).
Le bras espaceur E est constitué d'une séquence d'acides aminés identiques ou différents dont le rôle est de supprimer toute contrainte de structure potentiellement exercée par le porteur P sur la structure tridimensionnelle de la séquence S. Le bras espaceur selon l'invention comprend entre 2 et 25 acides aminés. La séquence en acides aminés est constituée principalement de glycine, proline ou alanine, dans la mesure où ces trois acides aminés représentent plus de 50% des acides aminés présents dans ladite séquence. A titre d'exemple, on pourra utiliser les "espaceurs naturels" riches en alanine et proline comme ceux décrits dans l'article de Qingcheng Mao et al. (Journal of biological chemistry, vol 270(31), 18295- 18300, 1995). A titre d'exemple on peut utiliser l'espaceur naturel ayant pour séquence la séquence en acides aminés suivante : Gly Ser Gly Ala
Ala Ala Pro Lys Ala Ala Pro Ala Leu Thr Pro Ala Asp Val Ala Arg Ser. De façon préférée, Le bras espaceur E est constitué uniquement de glycine et de façon encore plus préférée le bras est constitué de trois glycines.
Dans le cadre de la présente invention, P désigne une protéine ou peptide porteur. On entend par "protéine ou peptide porteur", dans le cadre de la présente invention, toute protéine ou peptide capable de stabiliser la structure tridimensionnelle de la séquence S sous une conformation telle que l'antigène protéique soit capable d'induire des anticorps neutralisant des isolats primaires du VIH.
De préférence, la protéine ou le peptide porteur renforce l'immunogénicité de la séquence S, notamment en augmentant la production d'anticorps spécifiques. La protéine ou le peptide comprend de préférence un ou plusieurs épitope(s) T helper. Par "épitope T helper", on entend un enchaînement d'acides aminés qui, dans le contexte d'une ou plusieurs molécules du MHC classe II, active les lymphocytes T helper.
Les effets de stabilisation et d'immunogenicite accrue sont obtenus lorsque la séquence S est liée à l'extrémité C ou N terminale de la protéine ou du peptide P via un bras espaceur E tel que défini ci dessus.
Comme protéine porteuse, on peut utiliser les protéines de surface de phages comme la protéine plll ou pVIII du phage M13, les protéines de surface bactériennes comme les protéines LambB, OmpC, OmpA, OmpF, et PhoE d'Escherichia coli, la protéine CotC ou CotD de Bacillus subtilis, les porines bactériennes comme la porine
P1 de Neisseria gonorrheae, la porine P1 ou P2 d'Haemophilus influenzae B, la porine de classe I de Neisseria meningitidis B, la porine P40 de Klebsiella pneumoniae; également les lipoprotéines comme OspA de Borrelia bugdorfi, PspA de Streptococcus pneumoniae, la Transferrine binding protein type 2 (TBP2) de Neisseria meningitidis B, TraT d'Escherichia coli, l'adhésine A de Streptococcus pneumoniae.
Sont également particulièrement appropriées dans le cadre de la présente invention, les toxines bactériennes détoxifiées comme l'anatoxine tétanique ou diphtérique, la sous unité B de la toxine cholérique ou la sous unité B de l'entérotoxine thermolabile d'Escherichia coli, l'exotoxine A de Pseudomonas aeruginosa, ou l'exotoxine A de Staphylococcus aureus.
Enfin, les "heat shock protein", comme Hsp 65 ou hsp 71 de Mycobacterium tuberculosis ou bovis, ou Hin 47 d' Haemophilus influenzae type B sont d'autres types
de protéines porteuses utilisables dans le cadre de l'invention.
Comme peptide porteur on peut citer à titre d'exemple non limitatif les peptides p24E, p24N, p24H, p24M, p24H décrits dans WO 94/29339 portant un épitope T helper, ou les peptides PADRE ( Pan DR T helper epitopes) décrits par Del guercio et al (Vaccine et al., (1997), Vol 15/4, p 441-448).
Les constituants P, E et S de l'antigène selon l'invention sont liés entre eux par une liaison peptidique entre les groupements COOH et NH2 présents aux extrémités N ou C terminales des constituants de sorte à former une structure de formule P-E-S. Les constituants P, E et S de l'antigène selon l'invention peuvent également être combinés de sorte à former une structure de type S-E-P-E-S dans laquelle les bras espaceurs E sont identiques ou différents et les séquences S sont identiques ou différentes.
L'antigène selon l'invention peut être obtenu par toute technique classique de synthèse chimique ou de génie génétique.
Lorsque l'antigène est produit par synthèse chimique, l'antigène selon la présente invention peut, soit être synthétisé sous la forme d'une séquence unique, soit sous la forme de plusieurs séquences qui sont ensuite liées les unes aux autres. Dans le cas d'antigènes de grande taille (> 50 acides aminés), les composants
P, E, S sont de préférence synthétisés séparément puis liés par tout procédé de couplage chimique approprié. La synthèse chimique peut être réalisée en phase solide ou en solution, ces deux techniques de synthèse étant bien connues de l'homme de l'art. Ces techniques sont décrites notamment par Atherton et Shepard dans "solid phase peptide synthesis" (IRL Press, oxford, 1989), et par Houbenweyl dans "Méthode der organischen chemie" éditée par E Wunsch, vol 15-1 et II- Thieme, Stuttgart, 1974.
L'antigène peut également être produit par les techniques de génie génétique bien connues de l'homme de l'art. Ces techniques sont décrites en détail dans Molecular Cloning: a molecular manual de Maniatis et al. Dans ce cas, on prépare classiquement un insert comprenant :
Une séquence d'oligonucléotides codant pour un premier site de restriction, Une séquence d'oligonucléotides codant pour le bras espaceur E,
Une séquence d'oligonucléotides codant pour la séquence S, et Une séquence d'oligonucléotides codant pour un deuxième site de restriction qui peut être identique au premier
Cet insert d'oligonucléotides est synthétisé à l'aide d'un synthétiseur d'oligonucléotides. Il est ensuite inséré dans un vecteur d'expression contenant le gène codant pour la protéine P. L'insert oligonucléotidique est inséré en phase, avec le cadre de lecture du gène codant pour ladite protéine. Dans le cas des protéines P comprenant une séquence signal, l'insertion se fait immédiatement après la séquence signal. Cette séquence signal correspond, soit à une séquence présente naturellement dans la protéine, soit à une séquence signal rajoutée, telle que ompA, lamB, etc.. pour faciliter les étapes de purification de l'antigène. Pour incorporer l'insert juste après la séquence signal, il est parfois nécessaire d'introduire un nouveau site de restriction immédiatement après la séquence signal ce qui se fait par mutagénèse dirigée du gène. On obtient ainsi l'expression de l'antigène selon l'invention dans lequel la séquence E-S est liée à l'une des extrémités terminales de la protéine P. Tout système d'expression vecteur/ cellule hôte décrit dans l'art antérieur pour la production de protéines recombinantes peut être utilisé dans le cadre de la présente invention.
Selon un mode de réalisation préféré, le vecteur d'expression est un phage, en particulier un phage filamenteux dérivé du phage M13 ou fd dans lequel l'insert oligonucléotidique est inséré derrière la séquence signal du gène codant pour la (les) protéine(s) pi II et/ou pVIII du phage. Au besoin, on introduit un site d'insertion immédiatement après la séquence signal de la protéine par mutagénèse dirigée pour pouvoir introduire l'insert oligonucléotidique. On peut également utiliser des mutants viables du phage M13 ou fd dans lesquels de nouveaux sites de restriction ont été créés dans le gène plll et/ou PVIII. A titre d'exemple on peut citer le phage fuse 2 ou fuse 5 ou les mutants viables cités dans l'article de lannolo et al. (J. Mol. Biol. (1995)
248, 835-844). En utilisant ce type de vecteur, la séquence S est reliée à l'extrémité
N terminale de la protéine plll et/ou PVIII au moyen d'un bras espaceur. Dans une telle construction, l'antigène est avantageusement exprimé à la surface du phage.
L'antigène ainsi produit est ensuite purifié par tout procédé classique de purification.
Lorsque l'antigène est exprimé à la surface du phage ou de la bactérie, il est dans un premier temps extrait sous l'action d'un milieu légèrement hyperosmotique
renfermant des inhibiteurs calciques (tels que EDTA), et des détergents légers (Tween® 20, triton). Les protéines de surface sont alors relarguées dans le milieu tandis que les autres constituants solides comme le core de la bactérie ou du phage précipitent par centrifugation. L'antigène récupéré dans le surnageant est purifié de ses autres contaminants à l'aide des techniques chromatographiques bien connues de l'homme du métier. Lorsque l'antigène est sécrété dans le milieu extracellulaire, il est directement récupéré dans le milieu de culture et purifié à l'aide de techniques chromatographiques usuelles comme cela est décrit dans l'article de Philippe Slos et al (Protein expression and purification, 5, 518-526 (1994)).
Plutôt que d'extraire et de purifier l'antigène exprimé à la surface du vecteur d'expression, il est souvent plus facile et parfois -plus avantageux d'utiliser le vecteur d'expression lui même. Selon un autre aspect, l'invention a donc pour objet tout vecteur d'expression exprimant un antigène tel que défini ci-dessus. On entend par "vecteur d'expression" dans le cadre de la présente invention tout vecteur comprenant une cassette d'expression contenant la séquence codant pour l'antigène protéique selon l'invention et des séquences régulatrices permettant l'expression de ladite séquence. Cette définition englobe donc les plasmides, les phages, ainsi que les virus. Tout vecteur approprié pour l'expression d'une protéine recombinante peut être utilisé dans le cadre de la présente invention.
Selon un mode de réalisation, les vecteurs d'expression sont de préférence des virus ou des phages. Le vecteur d'expression est de préférence un phage filamenteux recombinant exprimant de multiples exemplaires de l'antigène selon l'invention dans lequel la protéine P est représentée par la protéine plll et/ou PVIII de préférence pVIII. Ceci résulte du fait que les protéines plll et pVIII, sont présentes naturellement à la surface du phage sous forme d'unités répétitives (5 pour la protéine plll, plus de 2000 pour la protéine pVIII). L'expression d'exemplaires multiples de l'antigène à la surface du phage recombinant renforce le pouvoir immunogène de l'antigène.
La présente invention a également pour objet des vaccins anti VIH à des fins thérapeutiques ou prophylactiques. Les vaccins selon la présente invention comprennent au moins un antigène selon la présente invention en combinaison avec
un support ou diluant pharmaceutiquement acceptable et éventuellement un adjuvant. Le vaccin selon la présente invention peut donc contenir ou conduire à l'expression d'un seul type d'antigène protéique ou d'un mélange de divers types d'antigènes selon l'invention. Dans un tel cas de figure, ces antigènes peuvent se différencier par exemple par la nature de la séquence S ou par la nature de la protéine porteur. Selon un mode de réalisation préféré, le vaccin selon la présente invention comprend un vecteur d'expression tel que défini ci-dessus. Ce vecteur d'expression est avantageusement un phage, en particulier un phage filamenteux. Un vaccin comprenant un phage filamenteux recombinant exprimant à sa surface de multiples exemplaires d'un antigène de formule P-E-S dans lequel P représente la protéine plll et/ou pVIII, de préférence pVIII, est le mode de réalisation préféré selon l'invention.
La quantité d'antigène dans le vaccin selon la présente invention dépend de nombreux paramètres comme le comprend l'homme de l'art, tels que la nature de l'antigène, le taux d'expression de l'antigène par le vecteur d'expression, la voie d'administration, et l'état physique de la personne à traiter (poids, âge, sexe, état clinique). Il est également tenu compte de la masse relative de la protéine P par rapport à la séquence S.
Compte tenu de tous ces facteurs qui sont connus et appréciés par l'homme du métier, les quantités d'antigène administrées peuvent atteindre 1 à 10mg mais plus généralement se situent entre 5μg et 1mg, de préférence 50 à 500μg par injection.
Lorsque le vaccin renferme un vecteur d'expression selon l'invention, celui-ci est utilisé soit comme immunogène en tant que tel, soit comme agent de transfection des cellules. Un phage est administré en général à une dose minimale de 103,5 unités infectantes (pfu ou unité formant plage) mais de façon préférentielle dans une échelle de doses allant de 10 à 1012 pfu et de façon encore plus préférée dans une échelle de doses allant de 106 à 1010 pfu. L'homme de l'art peut se référer aux protocoles et essais cliniques utilisant des préparations à base de vecteurs recombinants, notamment les pox virus recombinants, les adenovirus recombinants, déjà réalisés chez l'homme pour convenir du nombre approprié de pfu que doit renfermer le vaccin. Lorsque le vaccin contient un plasmide recombinant selon l'invention, les doses injectées peuvent être très variables allant de 1 μg à 100mg, mais de façon préférentielle entre 0,1 mg à 10mg . L'homme de l'art peut également se référer aux
protocoles et essais cliniques déjà réalisés chez l'homme, concernant des préparations d'ADN plasmidique pour convenir de la dose appropriée de plasmides. Lorsque le vaccin contient un vecteur d'expression tel qu'un phage recombinant, un virus recombinant, le pouvoir infectant potentiel de ces microorganismes recombinants est en général neutralisé en utilisant des procédés qui n'altèrent pas la conformation de l'antigène selon l'invention. Par exemple, lorsqu'on administre une suspension de phages recombinants on a recours en général à une irradiation préalable de la suspension de phages pour faire chuter le titre infectieux.
Le vaccin selon l'invention peut également contenir un ou plusieurs adjuvants ou être incorporé dans des systèmes de délivrance compatibles avec' un usage en médecine humaine. On peut rapporter notamment l'usage des adjuvants comme l'Alum ( phosphate d'aluminium phosphate ou hy'droxyde d'aluminium ou le mélange des deux) incorporé de façon classique dans les vaccins, l'adjuvant incomplet de Freund, le lipide A monophosphorylé (MPL), QS21 , Polyphosphazène, muramyl dipeptide (MDP) ou ses dérivés, l'usage de systèmes de délivrance de l'antigène comme les émulsions (MF59, SAF1 , RIBI, SB 62, SB 26), les ISCOMS, les liposomes, les microsphères composées de polymères de PLGA de diamètre bien calibré, ou éventuellement les pseudo virions.
Les vaccins selon la présente invention peuvent être préparés par tout procédé classique connu de l'homme de l'art. Classiquement, les antigènes sont mélangés avec un support ou un diluant pharmaceutiquement acceptable tel que eau ou solution saline tamponnée ou phosphate. Le support ou diluant est sélectionné en fonction de la forme galénique choisie, du mode d'administration et de la voie d'administration ainsi que de la pratique pharmaceutique. Les supports ou diluants appropriés ainsi que les exigences en matière de formulation pharmaceutique sont décrits en détail dans le Remington's Pharmaceutical Science, représentant un ouvrage de référence dans ce domaine. Les vaccins mentionnés ci-dessus peuvent être administrés par toute voie classique, habituellement utilisée dans le domaine des vaccins, telle que la voie parentérale (intraveineuse, intramusculaire, sous cutanée, etc.). Le vaccin selon l'invention peut également être administré par la voie muqueuse. L'administration peut être réalisée par injection d'une dose unique ou de doses répétées.
Pour la prévention de l'infection à VIH, le vaccin peut être administré en une seule fois ou à plusieurs reprises de façon à obtenir un niveau de réponse immune qui assure la protection de l'individu vis à vis d'une contamination accidentelle. Dans le cas d'injections répétées, le protocole de vaccination comprend de façon préférentielle des injections à JO, à 1 mois, à 3 mois et à 6 mois. On a parfois recours à des vaccins différents pour les différentes injections. Il peut être également nécessaire pour maintenir le niveau de protection souhaité de pratiquer des injections de rappel à intervalles réguliers.
Pour le traitement de l'infection liée au VIH, le vaccin est administré en une seule fois ou à plusieurs reprises. Le délai entre chaque injection peut être très court, inférieur à une semaine, pour atteindre le niveau de réponse désirée, notamment celui qui permet de constater l'absence du virus VIH dans le sang par le test PCR. Au besoin, le vaccin thérapeutique peut être associé ou utilisé en alternance avec les traitements conventionnels de cette affection, comprenant notamment les mono, bi ou tri thérapie antivirale.
Que ce soit pour la prévention ou le traitement de l'infection à VIH, on peut aussi recourir à un vaccin comprenant un ou plusieurs antigènes et/ou un ou plusieurs vecteurs d'expression selon l'invention pour stimuler in vitro ou ex vivo les cellules du système immunitaire du patient et les ré-injecter ensuite dans l'organisme de l'individu.
L'invention a enfin pour objet l'utilisation d'un antigène ou d'un vecteur d'expression selon l'invention pour le diagnostic de l'infection à VIH ou pour suivre l'évolution de cette infection. On utilisera de préférence des méthodes immunoenzymatiques, radioimmunologiques, ou de western blotting bien connues de l'homme du métier, comme par exemple les méthodes ELISA, RIA, RIPA ou IRMA pour l'analyse de la réponse humorale. On peut également recourir aux méthodes utilisant le Biacore® qui permettent d'identifier les anticorps de haute affinité.
Sans avoir de caractère limitatif, la présente invention sera mieux comprise à la lecture des exemples suivants :
Exemple 1 : synthèse par génie génétique de phages recombinants exprimant à leur surface des antigènes protéiαues P-E-S.
Deux populations de phages recombinants exprimant à leur surface des antigènes protéiques P-E-S ont été obtenues. La première population est représentée par des phages recombinants pour lesquels l'une des séquences S, SEQ ID NO1 à SEQ ID N08 est reliée par l'intermédiaire d'un bras espaceur constitué de 3 glycines à l'extémité N terminale de la protéine Plll (phages recombinants plll). La deuxième population est représentée par des phages recombinants pour lesquels l'une des séquences S, SEQ ID NO1 à SEQ ID NO8 est reliée par l'intermédiaire d'un bras espaceur constitué de 3 glycines à l'extémité N terminale de la protéine PVIII (phages recombinants pVIII)
1.1 ) Synthèse des phages recombinants plll L'oligonucléotide codant pour le bras espaceur constitué de 3 glycines et l'une des séquences spécifiques SEQ ID NO:1 à SEQ ID NO:8 est synthétisé par voie chimique puis inséré immédiatement après la séquence signal du gène codant pour la protéine plll du phage fd selon la méthodologie décrite dans le chapitre intitulé "Construction of Random peptide Libraries in Bacteriophage M13 (Niels B. Adey, Andrew B Sparks, Jim Beasiy and Bryan K. Kay)" tiré du manuel " Phage display of Peptides and Proteins: a laboratory manual, edited by Bryan me Kay, Jill Winter and John Me Cafferty -Académie Press, Harcourt Brace and Company publishers. On a obtenu ainsi 8 populations de phages recombinants plll se distinguant par la séquence S qui est exprimée.
1.2) Sous-clonaαe des séquences spécifiques dans un autre phage
Les oligonucléotides synthétisés dans l'exemple 1.1 ont été sous clones dans un autre phage dénommé phage fd AMPLAY88 dont les caractéristiques sont décrites dans l'article de Malik P et al. (Nucleic Acid Research , vol 25 (4), p915- 917, (1997). On a obtenu ainsi des populations de phages recombinants pVIII se distinguant entre eux par la séquence S exprimée, avec l'avantage que les populations de phages recombinants pVIII expriment plus de séquences spécifiques S que les populations de phages recombinants plll.
Exemole 2 : Synthèse par voie chimique d'antigènes P-E-S
Les séquences' d'acides aminés SEQ ID NO:1 à SEQ ID NO:8 ont été synthétisées en phase solide en se référant aux méthodologies développées dans les ouvrages Solid phase peptide synthesis: a practical approach, IRL Press, Oxford, 1989 et Solid phase peptide synthesis, second édition, publié par Pierce Chemical Company, 1984. Ces synthèses ont été poursuivies de façon à ce que l'extrémité C ou N terminale des séquences S soit liée, soit à un bras espaceur ayant une structure répétée du type (Gly-)x dans laquelle x est compris entre 2 et 10, soit à un bras espaceur ayant une structure répétée du type (Gly-pro-)y dans laquelle y est compris entre 1 et 5 de façon à obtenir un peptide de formule E-S.
La fonction aminée des acides aminés est protégée par introduction d'un groupement t-butyloxycarbonyl (t-boc) permettant ainsi un couplage par la fonction carboxylique de l'acide aminé à une résine chlorométhylée active. Après fixation sur la résine, la fonction aminé est "déprotégée" par action de l'acide trifluoroacétique suivi d'une étape de neutralisation par la triethylamine. La fonction aminé ainsi libérée subit ensuite une réaction de couplage avec un autre acide aminé sous forme de dérivé t-boc par l'intermédiaire de carbodiimides. Ce procédé est mis en œuvre par l'automate ABI® (Applied Biosystem Inc) 430A qui réalise ainsi la synthèse automatique de peptides. A la fin de la synthèse, le peptide est décroché de la résine par action de l'acide fluorhydrique. L'extrait est ensuite purifié par HPLC en phase réverse en utilisant une colonne semi préparative de type Vydac® C4 et un gradient d'acétonitrile allant de 15 à 55% dans une solution d'acide trifuoroacétique à 0,1 %. La chromatographie liquide est programmée pour une période de 40 min avec un débit de 2 ml/min. Le taux de pureté des peptides E-S a été contrôlé par chromatographie analytique et dépasse 95%.
Le peptide E-S a été ensuite couplé à l'extrémité C terminal ou N terminal de l'anatoxine tétanique purifiée . On a obtenu en définitive une série d'antigènes P-E-S dans lesquels
P est représenté par l'anatoxine tétanique
E est représenté par une structure chimique répétée de type (Gly-)x dans
laquelle x est compris entre 2 et 10 ou de type (Gly-pro-)y dans laquelle y est compris entre 1 et 5.
S est représenté par l'une des séquences ID NO1 à ID NO8
Exemple 3 : Synthèse par génie génétigue d'antigènes de formule chimigue P-E-S
Le protocole opératoire suivi est similaire à celui décrit dans l'article de Philippe Slos et al (Protein expression and purification, 5, 518-526 (1994)).
On a incorporé deux sites de restriction aux deux extrémités d'un oligonucleotide constitué d'une séquence spécifique S codant pour l'une des séquences ID NO1 à ID NO8, et d'une séquence codant pour un bras espaceur E constitué d'un enchaînement de 3 à 10 résidus glycine. L'oligonucléotide a été ensuite incorporé immédiatement après la séquence signal de la sous unité B de la toxine cholérique. On a ensuite remplacé la séquence signal de la sous unité B de la toxine cholérique par la séquence signal ompA avant incorporation dans un vecteur plasmidique, type pARA 13 sous la dépendance de l'opéron arabinose de Salmonella typhimurium. Enfin on a transformé une souche d'Escherichia coli avec ce plasmide, qui produit alors directement dans un milieu de culture renfermant de l'arabinose, une quantité importante de l'antigène P-E-S dans lequel P est représenté par la sous unité B de la toxine cholérique
E est représenté par une structure chimique répétée de type (Gly-)x dans laquelle x est compris entre 3 et 10
S est représenté par l'une des séquences ID NO1 à ID NO8
Les antigènes sont purifiés directement à partir du milieu de culture en utilisant le procédé de purification décrit par Philippe Slos et al (Protein expression and purification, 5, 518-526 (1994))
Exemple 4 : induction d'anticorps neutralisants chez le cobaye
Les isolats de phages recombinants plll ou pVIII exprimant les séquences S ID: NO1 à ID: NO 8 à l'extrémité d'un bras espaceur E constitué de 3 glycines ont été testés pour leur capacité à induire des anticorps neutralisants d'isolats primaires chez
le cobaye. Après purification par double précipitation au polyéthylène glycol suivie d'une dialyse contre du PBS, les phages recombinants purifiés ont été injectés, par voie intramusculaire, dans les cuisses droite et gauche du cobaye à raison de 5x1011pfij par injection qui a été faite en présence ou non de 50μg de QS 21. Les cobayes ont reçu 3 injections à un mois d'intervalle. Les sérums ont été prélevés 3 semaines après la dernière immunisation pour étudier leur capacité à neutraliser le pouvoir infectieux de deux isolats primaires du virus VIH, Bx 08 et Bx 17 obtenus à partir de prélèvements de sujets séropositifs et asymptomatiques et cultivés uniquement par passages sur cellules mononucléees du sang périphérique humain (cf article de C. Moog et al -AIDS Research and human retroviruses, vol 13(1), 13-27, 1997).
On a évalué le pouvoir neutralisant des immunsérums vis à vis des isolats primaires Bx 08 et Bx 17 en déterminant la dose infectante 50% (TCID 50) de ces deux isolats en présence ou en l'absence d'immunsérum.
Au préalable, on a réalisé en parallèle une gamme de dilutions de raison 10 des suspensions virales Bx 08 et Bx 17 et, pour chaque sérum testé décomplémenté, une gamme de dilutions en milieu RPMI. Puis, on a incubé 50μl de chaque dilution virale avec 50μl de chaque dilution sérique pendant 1 heure à 37°C dans des microplaques 96 puits à fond rond. Chaque dilution a été testée en quadruplicate. 50μl d'une suspension contenant 105 cellules mononuclées du sang périphérique humain préalablement activées pendant 3 jours avec un milieu de culture contenant 1μg de phytohémagglutinine-P/ml ont été ensuite ajoutées. Après une période d'infection d'une heure à 37°C, le milieu de culture est débarrassé des virus résiduels par 2 lavages successifs avec 150μl de milieu RPMI. Après élimination du 2eme milieu de lavage, les cellules ont été remises en culture avec un milieu RPMI contenant 10% de sérum de veau fœtal additionné de 20UI/ml d'IL2. Au bout de 4 jours de culture, on a renouvelé une partie de ce milieu de culture avec du milieu de culture frais, puis au jour J7 et J10 on a prélevé une aliquote de 100μl de surnageant de culture, remplacé par du milieu frais à J7. Les prélèvements ont été gardés congelés jusqu'au dosage de la réplication virale. La réplication virale ainsi que la TCID 50 ont été quantifiées au moyen du dosage de la transcriptase inverse ou au moyen du dosage de la p24 par ELISA à l'aide de la trousse commercialisée par la société Coluter Immunotech
Beckman.
La neutralisation est considérée comme significative lorsque le ratio entre la valeur du TCID50 de la suspension virale en présence de la dilution sérique testée et celle obtenue en l'absence de sérum est <0,1. Les TCID50 sont calculés à l'aide de la formule de Kârber (Kârber G. Arch. Exp. Pathol. Pharmakol. 162: 956-959 (1931). Le titre de neutralisation est le facteur de dilution maximale du sérum pour lequel le ratio entre la valeur du TCID50 de la suspension virale en présence de la dilution sérique testée et celle obtenue en l'absence de sérum est <0,1, ce qui revient à une réduction de un log 10 du titre infectieux. Les résultats sont regroupés dans le tabjeau n°1
Tableau n°1
: La séquence S est exprimée à la surface du phage recombinant pVIII.
*: La séquence S est exprimée à la surface du phage recombinant plll.
représente l'inverse de la dilution du sérum testé pour laquelle on observe une
réduction d'au moins un log 10 du TCID 50 de l'isolât primaire testé par rapport au contrôle sans sérum. Les sérums sont considérés comme exerçant une activité neutralisante lorsqu'au moins la première dilution testée (1/5) entraîne cette réduction du TCID 50.
Les résultats figurant dans le tableau 1 montrent que les sérums provenant des animaux immunisés avec les différents phages recombinants testés ont une activité neutralisante vis à vis d'au moins un des deux isolats primaires testés. Les sérums de ces mêmes animaux avant immunisation (J0), ont été également contrôlés et se sont révélés négatifs. L'adjuvant QS21 a un effet inconstant sur la production d'anticorps neutralisants par les cobayes immunisés avec les différents phages recombinants. Il faut noter toutefois un effet adjuvant net sur la réponse des cobayes immunisés avec le phage recombinant exprimant la séquence S, Seq ID NO4.