FABRICATION D 'ACIERS INOXIDABLES ET D 'AC IERS A FORTES TENEURS EN ELEMENTS D ' ALLIAGE DANS UN FOUR ELECTRIQUE COMPRENANT DEUX ZONES DISTINCTES
Introduction
La présente invention concerne un procédé de production d'aciers inoxydables ou d'aciers à fortes teneurs en éléments d'alliages à partir de produits métalliques solides.
Traditionnellement, les aciers inoxydables sont produits à l'aide d'un four électri- que dans lequel de la ferraille d'aciers doux, de la ferraille d'aciers inoxydables et des éléments d'alliages sont fondus ensemble. Une fois les aciers fondus, le four est mis en arrêt et les aciers sont coulées et décarburés dans des dégazeurs sous vide et/ou dans des convertisseurs. Une telle filière est décrite dans la revue "Steel Times International" de novembre 1991 pp. 12-16. La productivité de cette filière est limitée pour plusieurs raisons:
- les éléments d'alliages ajoutés ont des points de fusion élevés et mettent par conséquent beaucoup plus de temps à fondre que les ferrailles, ce qui allonge considérablement le temps entre deux coulées,
- la puissance électrique doit être interrompue à chaque couiée, - les aciers coulés contiennent encore un taux de carbone très élevé se situant entre 1 ,5 % et 2%, ainsi les traitements ultérieurs pour décarburer sont difficiles et nécessitent beaucoup de temps.
Objet de l'invention
L'objet de la présente invention est de proposer un procédé de production d'aciers inoxydables ou d'aciers à fortes teneurs en éléments d'alliages à partir de produits métalliques solides dans un four électrique présentant un rendement plus élevé.
Description générale de l'invention
Conformément à l'invention, cet objectif est atteint par un procédé de production d'aciers inoxydables ou d'aciers à fortes teneurs en éléments d'alliages à partir de produits métalliques solides dans un four électrique à deux zones distinctes, à savoir une zone de fusion et une zone de traitement métallurgique, qui comprend les étapes consistant à: a) chauffer en continu les produits métalliques solides dans la zone de fusion jusqu'à la fusion des produits solides, b) ajouter du moins une partie des produits d'alliages dans la zone de fusion, c) transférer au fur et à mesure les produits fondus dans la zone de traitement métallurgique, d) décarburer les produits fondus dans la zone de traitement métallurgique jusqu'à une teneur en carbone finale inférieure ou égale à 1% et de préférence inférieure ou égale 0.6 % en poids, e) couler le métal fondu. Le métal coulé est ensuite transféré dans un convertisseur et/ou dans un dégazeur sous vide (VOD) et traité selon la méthode traditionnelle.
Ce procédé permet d'augmenter la productivité d'une ligne de production d'aciers inoxydables ou d'aciers à hautes teneurs en alliages. En effet, dans les procédés classiques, le métal coulé contient encore environ 1 ,5 % à 2% en poids de carbone, car il n'est possible de décarburer le métal sans avoir de pertes importantes au niveau des éléments d'alliages tels que le chrome que lorsque les températures dépassent 1600°C. Or, le chrome étant un élément d'alliage coûteux, on évite de décarburer le métal dans le four électrique. Si on attendait que le métal liquide ait atteint une température adéquate pour la décarburation, le temps entre deux coulées serait allongé considérablement et le rendement du four électrique diminuerait.
Un des avantages de ce procédé est qu'il permet d'obtenir un acier à teneur en carbone relativement faible, les temps de traitement dans le convertisseur ou le
dégazeur sous vide sont également raccourcis vu que la quantité de carbone à enlever est moindre. Le gain de productivité du four se répercute sur toute la ligne de production d'aciers inoxydables ou d'aciers à teneurs élevées en éléments d'alliages. Le procédé selon la présente invention permet d'affiner le métal fondu jusqu'à une teneur finale inférieure ou égale à 1 % et de préférence inférieure ou égale 0.6 % en C car dans la zone de traitement métallurgique où la décarburation est réalisée, les températures se situent en permanence à environ 1700°C. Des pertes d'éléments d'alliages et notamment de chrome ne sont pas à craindre dans ces conditions. Comme les produits métalliques solides sont fondus en continu et transférés dès leur fusion dans la zone de traitement métallurgique, la décarburation peut se faire en temps masqué, sans rallonger le temps entre deux coulées.
Comme les teneurs en carbone sont plus faibles au départ, les équipements assurant le traitement subséquent peuvent être utilisés d'une manière plus rationnelle et leur productivité peut être augmentée en conséquence.
De plus, comme de la ferraille est toujours présente autour des arcs électriques, la fusion de la ferraille est effectuée avec une meilleure efficacité thermique.
De par la fusion en continu, une certaine quantité de métal liquide est toujours conservée dans la zone de fusion et l'incorporation de la charge d'éléments d'alliages est fortement accélérée dans la mesure où celle-ci est chargée directement dans un bain de métal liquide. Les temps entre deux coulées successives peuvent être réduites à entre 40 et 50 minutes tandis que pour les procédés classiques les temps entre deux coulées sont de l'ordre de 80 minutes.
En plus de l'arc électrique, le chauffage et la fusion des produits solides peut être réalisé à l'aide de brûleurs, de torches à plasma ou à l'aide d'une combinaison de ces moyens.
Avantageusement, un apport d'énergie dans la zone de traitement métallurgique durant la phase initiale du procédé peut être réalisé à l'aide de brûleurs incorporés dans les parois de cette zone.
Selon un mode de réalisation avantageux, la teneur en éléments d'alliage est contrôlée et éventuellement ajustée avant la coulée du métal fondu de la zone de traitement métallurgique.
La lance à oxygène utilisée pour la décarburation doit se situer à une distance prédéterminée de la surface du bain afin d'obtenir un rendement optimal de la décarburation. Pour cette raison, il est préférable d'arrêter la décarburation c.-à-d. l'insufflation d'oxygène lors de la coulée du métal liquide.
Afin d'éviter que la charge décarburée ne soit contaminée par du métal fondu à teneur en carbone plus élevée, le transfert de produits fondus de la zone de fusion vers la zone de traitement métallurgique peut être interrompu pendant la coulée. Ceci peut être réalisé par un barrage amovible qui est introduit entre les deux zones au moment de la coulée.
Une certaine quantité de métal fondu est maintenue en permanence dans la zone de fusion et dans la zone de traitement métallurgique. Ce pied de bain sert à réduire l'usure du revêtement réfractaire du réacteur.
Si nécessaire, un pré-affinage des produits fondus peut être réalisé dans la zone de fusion au moyen de débits modérés d'oxygène respectivement d'un gaz contenant de l'oxygène. Lors de telles opérations de pré-affinage, la teneur en carbone de l'acier peut être réduite jusqu'à environ 1 ,6 %. Le rendement thermique du four peut être augmenté si les gaz libérés dans la zone de fusion et dans la zone de traitement métallurgique lors de l'affinage des produits fondus sont transférés dans la zone de fusion afin de réchauffer les produits solides se trouvant dans cette zone.
Avant leur chargement, les produits solides sont préchauffés à l'aide de gaz chauds du réacteur qui sont aspirés à travers la trémie d'alimentation du réacteur.
Description à l'aide des figures
D'autres particularités et caractéristiques de l'invention ressortiront de la description détaillée de quelques modes de réalisation avantageux présentés ci-dessous, à titre d'illustration, en référence aux dessins annexés. Celles ci montrent:
Fig.1 : une coupe longitudinale d'un four électrique de fusion en continu de produits solides, Fig.2: une vue de dessus du four de la Fig. 1.
Sur les figures, les mêmes références désignent des éléments identiques ou similaires.
La Fig. 1 montre une coupe d'un réacteur de fusion 10 en continu pour la production d'aciers inoxydables ou d'aciers à forte teneur en éléments d'alliages à partir de produits métalliques solides tels qu'un mélange de ferraille d'aciers doux, de ferrailles inoxydables et de différents ferro-alliages. Typiquement une charge pour produire un acier inoxydable classique à 18% en chrome (Cr) et à 8 % en nickel (Ni) se compose d'environ 30 % de ferraille d'aciers doux, d'environ 25% de ferraille d'aciers inoxydables, d'environ 25% de FeCrC (composition approximative Cr 54%, Fe 35%, Si 4%), d'environ 20 % de FeNi (composition approximative Fe 66%, Cr 1 %, Ni 30%, Si 1 ,5%, C 1 ,5%) et d'environ 0.5% en FeSi (composition approximative Fe 25%, Si 75%). Bien entendu, les constituants et leur proportions peuvent changer en fonction des disponibilités et de l'acier que l'on veut obtenir.
Le réacteur 10 est réalisé en tant que four électrique, dans lequel l'énergie nécessaire à la fusion est produite par un arc électrique et par des brûleurs 12 montés dans la partie latérale inférieure du four 10.
Le four électrique 10 comprend une sole 14 en un matériau réfractaire, surmontée d'une cuve 16 et d'une voûte 18. Au moins une électrode 20 montée sur un mât (non représenté) par l'intermédiaire d'un bras (non représenté) est introduite dans le four 10 à travers une ouverture 22 pratiquée dans la voûte 18. Le bras peut coulisser sur le mât de façon à faire monter et descendre l'électrode 20.
Le four électrique 10 comprend deux zone distinctes. La première zone, appelée zone de fusion 24, est chargée, de préférence en continu, par de la ferraille 25 à l'aide d'une trémie 26 verticale aménagée au-dessus de la zone de fusion 24. Dans cette zone de fusion 24, la ferraille 25 est fondue à l'aide des électrodes 20 traversant la voûte 18 du four 10. Pour augmenter la vitesse de fusion de la
ferraille 25, un apport supplémentaire d'énergie est réalisé à l'aide des brûleurs 12 dans la paroi latérale du four 10.
Au fur et à mesure que la ferraille 25 fond, du métal liquide s'accumule dans la sole 14 du four 10 et lorsque celui-ci atteint un certain niveau, il se déverse au- dessus d'un déversoir 27 dans la deuxième zone du four appelée zone de traitement métallurgique 28.
La zone de traitement métallurgique 28 peut être réalisée de sorte que l'on puisse l'enlever du four 10 et transférer son contenu dans un convertisseur ou dans un dégazeur sous vide. La deuxième zone 28 ne jouerait dès lors pas seulement un rôle dans la métallurgie mais servirait également de poche de transport.
La voûte 18 du four 10 comprend une ouverture ou sas 29 par laquelle les alliages sont introduits dans le four. Ces alliages sont en général des ferro-alliages lourds à fusion lente et peuvent constituer de 30 et 50% de la charge totale du four 10. Ces produits tombent directement dans le pied de bain contenant du métal fondu et commencent à fondre dès leur introduction dans le four 10.
Comme la zone de fusion 24 fonctionne de manière continue, la vitesse de fusion des blocs d'éléments d'alliages n'est plus un facteur limitant du procédé. En effet, si les blocs d'éléments d'alliages fondent plus lentement que la ferraille, il suffit d'en rajouter un certain excès dans la zone de fusion. Comme on peut admettre que la vitesse de fusion des blocs d'éléments d'alliages est constante, du moins lorsqu'ils sont submergés dans l'acier liquide, il suffit d'en ajouter un certain excès afin d'obtenir une concentration prédéterminée d'éléments d'alliages dans la zone de traitement métallurgique 28.
Alternativement, on peut charger une partie de la quantité totale d'éléments d'alliages nécessaires dans la zone de fusion 24, le restant peut être ajouté dans la zone de traitement métallurgique 28 ou même dans le convertisseur ou dans le dégazeur sous vide.
Comme la zone de fusion fonctionne de manière continue, la vitesse de fusion n'est plus un facteur limitant du procédé.
Dans la première phase du procédé, le métal liquide dans la zone de fusion 24 est soumis à des opérations de pré-affinage par injection de débits modérés d'environ 5 m3/t de gaz tels que de l'oxygène au moyen d'une lance (non représentée) afin d'ajuster la composition chimique du métal liquide. Lors de cette opération de pré- affinage, la teneur en carbone de l'acier peut être réduite jusqu'à environ 1 ,6 %.
Les gaz chauds libérés lors du pré-affinage des produits fondus sont aspirés par la trémie 26 alimentant le four 10 en ferraille 25. Une grande partie de l'énergie contenue dans ces gaz peut servir à chauffer la ferraille 25 dans la zone de fusion 24 ainsi que les produits solides contenus dans la trémie 26 de préchauffage. On se rapproche ici d'un echangeur thermique à contre-courant qui a une efficacité thermique optimale.
On ajoute de la chaux (CaO) principalement dans la zone de fusion de manière intermittente jusqu'à concurrence d'environ 6% de la charge métallique afin d'y former un laitier. Différents additifs comme p.ex. des fondants peuvent également y être ajoutés.
Le laitier contenu dans la zone de traitement métallurgique 28 y est maintenu par un barrage à laitier (non représenté), éventuellement amovible, installé entre les deux zones au niveau du déversoir 27. Ce barrage empêche le passage de laitier de la zone de fusion 24 dans la zone de traitement métallurgique 28. L'excédent de laitier est évacué par la porte de décrassage 38 aménagée dans la zone de fusion 24.
Dans la deuxième phase du procédé, le métal liquide dans la zone de traitement métallurgique 28 est soumis à une décarburation plus poussée par injection de débits élevés (25m3/min) de gaz tels que de l'oxygène au moyen d'une lance 32 afin diminuer la teneur en carbone de l'acier jusqu'à environ 0,6 %.
Pour garantir une bonne homogénéisation du bain de métal liquide, on injecte dans le bain d'acier liquide un gaz neutre (de l'argon) à travers un ou plusieurs bloc(s) poreux 40 par le fond de la zone de traitement métallurgique 28 afin d'homogénéiser la bain et de faire en sorte que la décarburation s'opère dans les meilleures conditions. Les pertes d'éléments d'alliages sont ainsi minimisées.
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Pendant cette phase de décarburation, on peut réduire ou même fermer complètement l'arrivée de métal liquide en provenance de la zone de fusion 24 dans le but de limiter la quantité de métal non affinée dans la zone de traitement métallurgique 28 pendant la décarburation. Après la décarburation, le métal liquide est analysé en ce qui concerne sa température et sa teneur en éléments d'alliages et on peut, le cas échéant, ajuster les teneurs de ces éléments par ajouts de ferro-alliages à granulométrie fine dans la zone de traitement métallurgique 28.
Le métal liquide est coulé depuis la zone de traitement métallurgique 28 par un trou de coulée 30 tout en conservant un fond de métal liquide dans cette zone. Ce pied de bain sert à réduire l'usure du revêtement réfractaire et grâce à lui le soufflage d'oxygène pour la décarburation peut être repris immédiatement après la coulée.
Il est à noter que le trou de coulée 30 peut aussi bien être aménagé dans la paroi latérale de la zone de traitement métallurgique 28 que dans le fond de cette zone.
Bien que dans le réacteur décrit ci-dessus la zone de traitement métallurgique 28 fonctionne en mode discontinu, il est à noter que la zone de fusion 24 fonctionne de manière continue. Les temps hors puissance occasionnés par les procédures de chargement et de coulée dans les fours classiques sont donc supprimés et la baisse de la puissance utilisable dans la période finale dite d'affinage et de surchauffe n'est plus nécessaire.
Les flux de matières et les flux d'énergie du four peuvent se résumer de la manière suivante: de la ferraille 25 est introduite dans le four par la trémie 26 et elle traverse la zone de fusion 24 pour être ensuite soutirée par la zone de traitement métallurgique 28.
Le flux de gaz traverse le four en sens inverse. En effet, les gaz sont injectés ou formés dans la zone de traitement métallurgique 28 et la zone de fusion 24 pour être aspirés par la trémie 26.
Le présent procédé permet donc .d'obtenir des teneurs en carbone beaucoup plus basses que celles obtenues par les procédés classiques et ce tout en ayant des
performances comparables pour ce qui est du chrome et des résultats bien meilleurs en productivité et en consommation énergétique.