Arrière-plan de l'invention L'invention concerne le démarrage d'un moteur d'aéronef dans des conditions de froid extrême. Le domaine d'application de l'invention est plus particulièrement celui des moteurs d'avion, notamment des moteurs à turbine à gaz.
On sait que la viscosité de l'huile de lubrification d'un moteur augmente lorsque la température baisse. Ainsi, dans des conditions de froid extrême, par exemple pour une température inférieure à -15°C, l'huile présente une viscosité élevée, ce qui a pour conséquence un couple de démarrage du moteur élevé.
De nombreux avions sont équipés d'un système de démarrage à air, dans lequel le moteur est couplé à un démarreur pneumatique. Un tel démarreur pneumatique ne peut assurer le démarrage du moteur dans des conditions de froid extrême sans préchauffage de l'huile moteur. Il est connu de préchauffer l'huile par ventilation d'air chaud autour du réservoir et des canalisations d'huile après ouverture des capots moteurs. Autrement dit, une intervention externe par grand froid, impliquant l'ouverture des capots moteurs, est nécessaire. Une source d'air chaud est également nécessaire. Dans certains avions, le moteur est couplé à un (ou plusieurs) démarreur-générateur électrique (S/G pour « Starter/Generator » en anglais). Après démarrage et allumage du moteur, le S/G fonctionne en générateur synchrone et alimente un réseau électrique de l'avion. Pour le démarrage du moteur, le S/G est alimenté en puissance électrique, par exemple à partir d'un groupe de parc ou d'une unité de puissance auxiliaire. Le S/G fonctionne en moteur électrique et entraîne le moteur en rotation. Le S/G peut être dimensionné pour fournir un couple correspondant au couple de démarrage du moteur en conditions de froid extrême. Cependant, ce couple est significativement supérieur au couple de démarrage à température plus élevée. Ainsi, le démarrage par grand froid implique un surdimensionnement du S/G et de son électronique de puissance, conduisant à une masse et à un encombrement importants. De plus, le groupe de parc doit être capable de fournir la puissance élevée nécessaire au démarrage. La figure 1 illustre ce besoin de surdimensionnement. Le graphe de la figure 1 montre le couple résistif moteur C (en N.m) en fonction du régime N (en tour par minute), pour un exemple de démarrage d'un moteur d'avion à une température de -40° F (-40°C). La courbe 1 représente le couple dû à la viscosité de l'huile, la courbe 2 représente le couple aérodynamique, et le couple 3 représente le couple total. En négligeant le couple hydraulique dû au fonctionnement des pompes du circuit de lubrification, le couple total est égal à la somme du couple dû à la viscosité et du couple aérodynamique. On peut constater sur la figure 1 que la courbe 3 présente un sommet pour un régime N = 1000 T/min environ. La courbe 1 montre que ce sommet est essentiellement dû à la viscosité de l'huile. Le S/G doit être dimensionné pour être capable de fournir le couple de ce sommet. Par comparaison, lors d'un démarrage dans des conditions de température « normales », par exemple à 59°F (15°C), le couple résistif moteur est principalement dû au couple aérodynamique. Ainsi, comme le montre la courbe 2, il augmente progressivement avec le régime moteur et, pour un régime de l'ordre de 1000 T/min, il est nettement inférieur au couple du sommet de la figure 1. Ainsi, le démarrage en condition de froid extrême est dimensionnant pour le S/G.
Objet et résumé de l'invention L'invention vise à fournir un procédé de démarrage d'un moteur d'aéronef, qui ne présente pas les inconvénients de l'art antérieur précité. A cet effet, l'invention propose un procédé de démarrage d'un moteur d'aéronef dans lequel ledit moteur est couplé mécaniquement à un démarreur électrique et un circuit de lubrification est apte à faire circuler de l'huile dans ledit moteur, ledit procédé étant caractérisé par le fait qu'il comprend : - une étape de préchauffage de l'huile du circuit de lubrification consistant à entraîner le moteur avec le démarreur électrique à une vitesse inférieure à un seuil de vitesse déterminé, - une étape de détection de condition de démarrage consistant à détecter qu'une température d'huile dans le circuit de lubrification est supérieure à un seuil de température déterminé, et - après ladite étape de détection de condition de démarrage, une étape de démarrage consistant à entraîner le moteur avec le démarreur électrique à une vitesse supérieure audit seuil de vitesse. Pendant l'étape de préchauffage, la température de l'huile augmente progressivement. Comme le moteur est entraîné à vitesse réduite, un couple élevé n'est pas nécessaire. Ensuite, pendant l'étape de démarrage, comme l'huile a été préchauffée, un couple élevé n'est pas non plus nécessaire. Le démarreur électrique peut donc être dimensionné avec un encombrement et une masse faible. Le procédé peut comprendre, avant ladite étape de préchauffage : - une étape de détection de conditions givrantes consistant à détecter qu'une température d'huile dans le circuit de lubrification est inférieure à un deuxième seuil de température, - après ladite étape de détection de conditions givrantes, une étape de signalisation de conditions givrantes.
Cela permet au pilote ou à un technicien de maintenance de constater qu'un préchauffage est demandé. Selon un mode de réalisation, le procédé comprend, après ladite étape de détection de condition de démarrage et avant ladite étape de démarrage, une étape de signalisation de condition de démarrage.
Ainsi, le pilote peut être informé que la température de l'huile est suffisamment élevée et qu'il est possible de démarrer. L'étape de préchauffage peut présenter, par exemple, une durée comprise entre 8 et 10 minutes. L'invention propose également un dispositif de commande du démarrage d'un moteur d'aéronef dans lequel ledit moteur est couplé mécaniquement à un démarreur électrique et un circuit de lubrification est apte à faire circuler de l'huile dans ledit moteur, ledit dispositif de commande étant caractérisé par le fait qu'il comprend : - des moyens de préchauffage de l'huile du circuit de lubrification aptes à 35 commander l'entraînement du moteur avec le démarreur électrique à une vitesse inférieure à un seuil de vitesse déterminé, - des moyens de détection de condition de démarrage aptes à détecter qu'une température d'huile dans le circuit de lubrification est supérieure à un seuil de température déterminé, et - des moyens de démarrage apte à commander l'entraînement du moteur avec le démarreur électrique à une vitesse supérieure audit seuil de vitesse. L'invention fournit aussi un aéronef comprenant un moteur couplé mécaniquement à un démarreur électrique, un circuit de lubrification apte à faire circuler de l'huile dans ledit moteur, et un dispositif de commande de démarrage selon l'invention ci-dessus. Selon un mode de réalisation, l'aéronef comprend un deuxième circuit de lubrification apte à faire circuler de l'huile dans ledit démarreur et un échangeur de chaleur entre ledit circuit de lubrification et ledit deuxième circuit de lubrification.
Dans ce cas, la chaleur provenant des pertes thermiques du démarreur électrique est transmise, par l'intermédiaire de l'huile du deuxième circuit de lubrification et de l'échangeur de chaleur, à l'huile moteur. Selon un autre mode de réalisation, ledit circuit de lubrification comprend un réservoir, une portion moteur apte à faire circuler de l'huile entre le réservoir et le moteur et une portion démarreur apte à faire circuler de l'huile entre le réservoir et le démarreur. Dans ce cas, comme le réservoir est commun à la portion moteur et à la portion démarreur, la chaleur provenant des pertes thermiques du démarreur électrique contribue à chauffer l'huile moteur. Brève description des dessins L'invention sera mieux comprise à la lecture de la description faite ci-après, à titre indicatif mais non limitatif, en référence aux dessins annexés, sur lesquels : la figure 1 est un graphe illustrant le besoin de surdimensionnement des S/G de l'art antérieur, - la figure 2 est un graphe illustrant le déroulement d'une étape de préchauffage selon un mode de réalisation de l'invention, - la figure 3 est un schéma d'un circuit de lubrification pouvant être utilisé pour mettre en oeuvre un mode de réalisation de l'invention, et - la figure 4 est un schéma d'un autre circuit de lubrification pouvant être utilisé pour mettre en oeuvre un mode de réalisation de l'invention.
Description détaillée de modes de réalisation La figure 3 représente, de manière simplifiée, le circuit de lubrification 10 d'un moteur d'aéronef. Le moteur est par exemple un moteur à turbine à gaz et est couplé mécaniquement à deux démarreurs-générateurs 12 électriques, notés S/G 1 et S/G 2 pour « Starter/Generator ». Le circuit de lubrification 10 est destiné à faire circuler de l'huile entre un réservoir 11, les démarreurs-générateurs 12, plusieurs parties du moteur et des mécanismes associés. Plus précisément, le circuit de lubrification 10 est relié à un carter avant 13 du moteur, un carter arrière 14 du moteur, une turbine à air 15 du moteur, un boîtier à engrenages 16 pour accessoires couplé au moteur (AGB pour « Accessory Gear Box » en anglais), un ventilateur 17 de l'AGB et un boîtier à engrenages 18 de la turbine (TGB pour « Turbine Gear Box » en anglais). Comme le montre la figure 3, le circuit de lubrification 10 comprend une portion moteur 20, alimentée à partir du réservoir 11 par une pompe 19, et une portion démarreur/générateur 23, alimentée à partir du réservoir par des pompes 21. La portion moteur 20 alimente le carter avant 13, le carter arrière 14, la turbine à air 15, le boîtier à engrenages 16, le ventilateur 17 et le boîtier à engrenages 18. Des pompes 27 ramènent l'huile au réservoir 11.
La portion démarreur/générateur 23 alimente les démarreurs- générateurs 12. Une pompe 22 ramène l'huile au réservoir 11. Par ailleurs, le circuit de lubrification 10 comprend également, de manière connue, des filtres 24 avec circuit de contournement, des refroidisseurs 25 à air, des refroidisseurs 26 à carburant, une valve anti- fuite (non représentée). Un capteur de température (non représenté) permet de mesurer la température d'huile à un endroit du circuit de lubrification 10, par exemple dans le réservoir 11. On décrit maintenant un exemple de déroulement de démarrage du moteur.
Lorsque l'avion est au sol et le moteur est à l'arrêt, des conditions de froid extrême, ou conditions givrantes, peuvent être détectées grâce au capteur de température. Si la température mesurée est inférieure à un seuil de température déterminé, par exemple -15°C, les conditions givrantes sont signalées, par exemple en allumant un voyant lumineux sur le tableau de bord. Ceci indique au pilote ou à un technicien de maintenance que le préchauffage de l'huile du moteur est demandé. Le pilote ou le technicien peut alors générer un ordre de préchauffage, par exemple par une commande du tableau de bord. En réponse à cet ordre de préchauffage, les démarreurs-générateurs 12 sont commandés pour entrainer le moteur en rotation, à une faible vitesse. Par exemple, le moteur est entrainé à une vitesse qui correspond à entre 8% et 12% de son régime de moulinet (« windmill » en anglais). Cette vitesse est inférieure à la vitesse correspondant au sommet de couple de la figure 1. Ainsi, le couple que doivent fournir les démarreurs-générateurs 12 n'est pas très élevé. En raison des pertes thermiques des démarreurs-générateurs 12, la température de l'huile augmente progressivement. Les pertes thermiques de paliers des enceintes moteur et, dans une moindre mesure, dans le boîtier à engrenages 16 (AGB), contribuent également à l'augmentation de la température de l'huile. Ainsi, le couple résistif moteur diminue progressivement. Cette étape pendant laquelle le moteur est entraîné à faible vitesse constitue donc une étape de préchauffage de l'huile, qui peut durer par exemple entre 8 et 10 minutes. Ceci est illustré sur le graphe de la figure 2. Dans la partie inférieure de la figure 2, la courbe 30 représente la température T° de l'huile en fonction du temps. Dans la partie supérieure de la figure 2, la courbe 31 représente le couple des S/G et la courbe 32 représente le couple résistif moteur. Le couple des S/G étant supérieure au couple résistif moteur, le régime augmente progressivement.
Lorsque la température de l'huile dépasse un seuil de température déterminé (qui peut être égal ou différent du seuil de température pour la détection des conditions givrantes), il devient possible de démarrer le moteur sans devoir fournir un couple élevé comme dans le cas de la figure 1. Ainsi, la possibilité de démarrer est signalée au pilote, par exemple en allumant un voyant lumineux sur le tableau de bord.
Lorsqu'il constate que le démarrage est possible, le pilote peut donner un ordre de démarrage. Le moteur est alors entraîné par les démarreurs-générateurs à une vitesse qui augmente progressivement en dépassant la faible vitesse utilisée pendant l'étape de préchauffage. Le couple résistif moteur est principalement dû au couple aérodynamique. Il augmente donc progressivement avec le régime, comme dans le cas d'un démarrage à température « normale ». La figure 4 représente une variante de la figure 3. Les éléments identiques ou similaires à des éléments de la figure 3 sont désignés par les mêmes références. Dans la variante de la figure 4, le circuit de lubrification 10 du moteur est séparé du circuit de lubrification 40 des démarreurs-générateurs 12. Comme le montre la figure 4, le circuit de lubrification 40 est séparé en deux parties, une pour chaque démarreur-générateur 12. Chaque partie comprend un réservoir 41 distinct du réservoir 11.
Dans cette variante, comme les circuits de lubrification 10 et 40 sont séparés, lorsque le moteur est entraîné à faible vitesse par les démarreurs-générateurs 12, les pertes thermiques des démarreurs-générateurs 12 ne contribuent pas à chauffer l'huile du circuit de lubrification 10. Toutefois, les pertes thermiques de paliers des enceintes moteur et dans le boîtier à engrenages 16 (AGB) et dans une moindre mesure des équipements entrainés, permettent une augmentation de la température de l'huile du circuit de lubrification 10. Ainsi, comme dans le cas de la figure 3, l'étape pendant laquelle le moteur est entraîné à faible vitesse constitue une étape de préchauffage de l'huile moteur. Dans une variante de la figure 4, un échangeur de chaleur (non représenté) permet d'échanger de la chaleur entre les circuits de lubrification 10 et 40. Ainsi, comme dans le cas de la figure 3, les pertes thermiques des démarreurs-générateurs 12 contribuent à augmenter la température de l'huile moteur. Le temps nécessaire à atteindre une température permettant le démarrage est donc réduit.
Dans tous les cas, l'étape de préchauffage de l'huile moteur est réalisée en entraînant le moteur avec les démarreurs-générateurs à une vitesse réduite, ce qui ne nécessite pas un couple élevé. Ainsi, les démarreurs-générateurs ne doivent pas être dimensionnés pour un couple élevé. Leur encombrement et leur masse sont donc réduits. De même, l'électronique de puissance des démarreurs-générateurs ne nécessite pas un dimensionnement important. Enfin, le groupe de parc qui alimente le réseau électrique de l'avion lorsqu'il est au sol, et fournit la puissance nécessaire aux démarreurs-générateurs pour entraîner le moteur, ne doit pas non plus être dimensionné pour fournir une puissance élevée.